jeudi 4 juin 2009

Prague, "À ceux-là", Dieppe, Washington, ... ... ....et ça continue !.....



Prague 17 novembre 1989, auteur de la photo inconnu.

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POAIME DE JACQUES BRAULT

À ceux-là

Nos morts là-bas dorment casqués de certitude

Épaves promises à tous les rivages rêvés
ils partirent un matin à la dérive
dans le plis du grand fleuve qui bouge vers la mer
ils partirent déjà délestés de leur nom
comme la vague qui court à sa brisure n’a déjà plus de visage

Nos morts là-bas dorment casqués de certitude

Dans le ventre de la terre qui les aspire
par les boyaux les artères les entrailles
ils retournent à la glaise du chaos
au vacarme premier des fossiles en marche
au cri que pousse la planète naissante
au velours de la pâte aux bulles du possible

Nos morts là-bas dorment casqués de certitude

Leurs yeux perlent à l’orient de l’ombre
au flanc du sommeil où dormir à perte d’ennui
corps qui se dissolvent dans l’anonymat
ils s’allègent d’eux-mêmes s’abîment
dans l’espace où bruissent encore d’autres espaces
se figent dans la glace et le sel d’un instant énorme

Nos morts là-bas dorment casqués de certitude

Frères désertés de l’humaine transhumance
morts inaccessibles à notre quête
morts indubitables morts de fragrance
morts acquittés de notre agonie
frères inhumains frères surhumains
ô frères dans la mort criez criez quand l’aile de l’effraie frôle nos tempes

Nos morts là-bas dorment casqués de certitude

Rivés au chambranle de nos limbes livides
où ronronnent tes moulins jaculatoires de la bêtise
où marmonnent les apothicaires de la démence
où la carapace de neige et de peur nous pressure
nous incruste dans la nacre et l’os du silence
nous fossilise pour les temps qui ne viendront jamais

Nous aussi nous dormons casqués de certitude

(je l’ai lu à voix haute à trois reprises simultanément et c’est à ce moment que ce poème a pris tout son sens)


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Dieppe de Vilains Pingouins

Une médaille pour les braves, et reposez dans vos tombes
L'État a dit qu'l'heure était grave, qu'il fallait que l'ennemi tombe
On est allé s'battre au front, on en avait tout l'tour d'la tête
On pensait r'venir les bras pleins d'galons
Mais c'est là qu'ils nous ont fait notre fête.
Vous pouvez pas savoir comment on se sent
De s'tenir debout un fusil à la main,
De voir ses frères se traîner dans leur sang,
Savoir qu'on n'sera que des souvenirs demain.
Allez donc savoir qui a raison, qui a tort
Et qui peut célébrer la victoire,
Quand les peuples font le décompte de leurs morts,
Quand vainqueurs et vaincus doivent se vêtir de noir!
Moi mes fantômes ont beaucoup voyagé
On a donné nos vies pour vos libertés
On a rendu nos âmes, on a rendu nos armes
Mais pourquoi faire couler tant de sang, tant de larmes!
Et ça continue.
Une médaille pour les fous
Qui croyaient en finir
Ils oubliaient par-dessus tout
Qu'l'homme n'apprend pas d'son passé, il répète pour l'avenir.
Ah! tant de stupidités,
Issues de notre cupidité
La mort ça fait mal, même quand c'est au nom du bien
Puis j'me rend compte qu'on a peut-être fait ça pour rien.
Ceci est pour ceux qui croient à la vie
Ceci est pour ceux qui n'ont rien compris
La haine et la guerre n'ont pas leur raison
Mais l'homme non plus, et ça continue...
Moi mes fantômes ont beaucoup voyagé
On a donné nos vies pour vos libertés
On a rendu nos âmes, on a rendu nos armes
Mais pourquoi faire couler tant de sang, tant de larmes!
Et ça continue.

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Photo de Jacques Riboud, Washington 1967

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