samedi 19 janvier 2013

Pour La Rouge (ou plutôt JOYCE....)


Puisque je sais combien tu aimes les hommes qui louchent ! Ne me remercie pas.

Pour JP encore

jeudi 17 janvier 2013

Petite histoire très carnavalesque des Salons du livre (VLB, 2001 dans Les mots des autres, la passion d’éditer.)



"La première fois que j’ai mis les pieds au Palais du commerce, c’était au milieu des années soixante pour la Foire internationale du livre de Montréal.  J.Z. Léon Patenaude avait mis son habit de grand zouave de côté, avait rompu avec Jean Drapeau et se vouait à la cause sacrée du livre en compagnie de Jacques Hébert et de Pierre Tisseyre.  Aussi mégalomane que le maire de Montréal, J. Z. Léon Patenaude rêvait de concurrencer en Amérique la Foire de Francfort, haut lieu de rencontre de tous les éditeurs du monde.

Mais la réalité québécoise de l’édition était loin d’être de ce bord-là des choses et, à défaut d’accueillir les grandes maisons étrangères, la Foire internationale du livre de Montréal ouvrit le Palais du commerce aux tireurs de bonne aventure : entre le stand des Éditions du jour et celui du Cercle du Livre de France, on entrait dans un tunnel.  Au bout de ce tunnel, un autre stand où vous attendaient la carte de votre ciel, la boule de cristal et l’excitant jeu du tarot.  On y retrouvait peut-être Kafka et Beckett mais c’était de façon tout à fait absurde, pour ne pas dire entre les lignes.

Cette première expérience m’ayant plutôt désenchanté, je ne serais sans doute plus retourné à une foire ou à un salon du livre.  En 1968 toutefois, Jacques Hébert fit de moi son adjoint aux Éditions du Jour.  J’avais à peine pris possession de mon bureau qu’il me fallut déjà décabaner pour Québec où se tenait un Salon du livre.  Avant de m’y rendre, je devais prendre à son hôtel l’écrivain français jean Duché.  Non satisfait de me considérer comme son chauffeur attitré, il me demanda aussi, et plutôt avec arrogance, de porter ses bagages ! Jusqu’à Québec, Jean Duché ne m’adressa pas la parole une seule fois : il ne parlait pas aux Sauvages, il les étudiait.  Mais quand Jacques Hébert lui apprit que j’étais son adjoint, vous auriez dû voir la tête de Jean Duché : s’il avait pu disparaître sous la pile de livres devant lesquels il était assis, il l’aurait fait.

Pour ma part, j’avoue que l’attitude de Jean Duché n’a pas amélioré mes rapports, déjà plutôt froids, avec les écrivains français et leurs éditeurs.  En plus de contrôler plus de 80 % du marché québécois du livre, ils étaient sinon outrecuidants du moins condescendants avec nous, les aborigènes.  Ils étaient à eux seuls toute la littérature et ce qu’ils attendaient de nous, c’était que nous leur servions de faire-valoir.  Même le grand Bernard Pivot n’échappa pas à la règle.  Quand il visita le Salon du livre de Québec en 1981, il se retrouva devant Yves Thériault qui, au stand de ma maison d’édition, dédicaçait ses ouvrages.  Yves Thériault faillit s’étouffer de rage quand le grand Bernard Pivot lui demanda : « À part « Valère et le grand canot », avez-vous écrit autre chose ? »

À la décharge des Français, disons que certains Salons du livre auxquels j’ai participé ne pouvaient que les conforter dans leur attitude un tant soit peu méprisante.  Au Salon du livre de Québec toujours, on exhibait des poumons noircis par la nicotine dans de gros bocaux de formol, on accueillait à bras ouverts les extraterrestres, la société du Graal, les raëliens et les adorateurs du soleil de la Fraternité blanche universelle, sans parler d’André Dion et de sa famille qui, revêtus de tutus et d’escarpins, flippaient sur les oiseaux dans des chorégraphies sifflées qui vous donnaient effectivement le goût de migrer au bout du monde.

Ce bout du monde là, ça aurait pu être Drummondville qui pour moi a remporté le championnat toutes catégories de l’originalité depuis que je suis éditeur.  C’était au début des années quatre-vingt.  Ça avait lieu en même temps sur le même terrain, en l’occurrence en plein champ, à l’extérieur même de la ville. Le Salon du livre se tenait sous un grand chapiteau, non loin d’un pavillon dans lequel on faisait la traite des vaches.  Plutôt qu’aux petits oiseaux d’André Dion et de sa famille, on avait droit à la bouse, aux meuglements ou bien à un petit bœuf boqué qui faisait faux bond à son gardien et voulait nous visiter, sans doute à la recherche des « Vertes Collines d’Afrique » de M. Hemingway! 

Ce fut ainsi fort bucolique pendant deux jours.  Au troisième, le ciel nous tomba littéralement sur la tête.  Dans la nuit, un gros orage frappa Drummondville et le chapiteau, qui avait été mal monté, se mit à couler comme une passoire.  On se retrouva dans la boue jusqu’aux chevilles et, pour que les éditeurs puissent se rendre à leurs stands afin de constater les dégâts, il fallut leur construire des trottoirs de bois !

C’est cette même année là d’ailleurs que je fus poursuivi par le plus étrange personnage jamais rencontré au cours des trente ans que j’ai passés dans les Salons du livre.  En ma qualité d’éditeur, je participais bon an mal an à une dizaine de ces manifestations, de Hull à Trois-Rivières, de Montréal à Rimouski, de Sherbrooke à Québec.  J’eus donc droit plusieurs fois à la visite d’originaux et de détraqués, mais personne n’arrivera jamais à la cheville de cette auteure schizophrène qui courut après moi toute une année durant.

Ça commença d’abord à la maison d’édition.  Un jour, une femme y vint, sous le prétexte d’un manuscrit à me présenter.  Elle n’était pas assise devant moi depuis trente secondes qu’elle me dit : « Je n’aime pas les vibrations qu’il y a ici.  Est-ce qu’on peut aller ailleurs ? »  Je l’emmenai donc au restaurant.  Une fois qu’on s’y fut retrouvés assis, la femme sortit un petit miroir de son sac, déchira un coin de napperon, en fit une boule qu’elle trempa dans un verre d’eau, puis elle colla cette boule-là en plein milieu du petit miroir et me demanda de la regarder fixement pendant trente secondes.  Après, elle me dit : « Est-ce que ça va mieux maintenant ? » Je lui répondis : « Je ne me sentais pas mal tantôt.  Là, c’est pas mal pareil ».  Comme si elle avait eu un ressort sous elle, la femme se leva, me pointa du doigt et, toute contractée du visage, s’écria : « T’es pas tanné de vivre dans ta merde ? Penses-y comme il faut parce que c’est la dernière fois que je te le dis! »  Elle vira ensuite carré et sortit pareille à une furie du restaurant.  Ça avait été rien de moins que délirant, mais je ne trouvai pas autre chose à faire que de refouler dans ma mémoire cet épisode farfelu de ma vie d’éditeur. 

Le problème, c’est que commença la samba des Salons du livre.  Je remplissais mon station-wagon des ouvrages que je publiais et je sillonnais le Québec comme un peddleur de vieux chaudrons.  Mais partout où je m’arrêtais, je n’avais pas le temps de monter mon stand que l’étrange créature s’arrêtait devant, me regardait de ses yeux exorbités et, de sa mains levée dans celle de l’espèce de gorille qui l’accompagnait, me criait : « T’es pas tanné de vivre dans ta merde ? Penses-y comme il faut parce que c’est la dernière fois que je te le dis! »  Elle disparaissait aussitôt jusqu’au Salon du livre suivant.  C’était hallucinant, de quoi ne pas comprendre tous ces écrivains qui , interviewés à la télévision, n’en finissent pas de dire qu’il aiment les Salons du livre parce que ça leur permet de rencontrer enfin leurs véritables lectrices et leurs véritables lecteurs !

Yves Thériault, que j’ai accompagné dans plusieurs Salons du livre, était plus prosaïque.  Pour lui, un Salon n’était rien d’autre qu’une occasion de vendre davantage de livres.  Comme il trouvait l’atmosphère des Salons généralement trop constipée pour lui, il avait toujours plein d’idées pour les animer.  À la fin des années soixante, il proposa à Jacques Hébert de se faire enfermer dans une cage de verre au beau milieu de la salle d’exposition de la Place Bonaventure.  Emprisonné vingt-quatre heures par jour dans cette cage de verre, Thériault voulait écrire un roman qu’un imprimeur aurait composé en simultanéité puis imprimé avant la fermeture du Salon.  Vers la fin du dernier jour, Thériault serait sorti de sa cage de verre pour lancer officiellement son fameux roman.  De peur de se faire accuser de ravaler l’écriture au rang d’un cirque forain, Jacques Hébert ne donna pas suite au projet de Thériault.  Quelques temps avant sa mort, l’auteur d’« Agaguk » m’en parlait encore comme d’une formidable occasion manquée.

Pour démontrer que les auteurs ne sont pas toujours aussi honnêtes qu’ils le disent quand ils prétendent mettre la littérature au-dessus de tout, même dans les Salons du livre, une dernière anecdote qui concerne encore Yves Thériault.  Dans tous les Salons du livre que nous faisions ensemble, nous avions pris l’habitude de parier : qui de Thériault ou de moi vendrait le plus grand nombre d’ouvrages ? Bien évidemment, Thériault l’emportait tout le temps sur moi, sauf en 1983 où je l’ai battu en utilisant un stratagème dont je me gardai bien de lui révéler le secret.  Mon ami Ben Weider dédicaçait l’un de ses ouvrages sur napoléon au stand de Leméac situé presque en face du nôtre.  J’allai le voir et lui demandai son aide pour venir à bout de Thériault.  Ben Weider embarqua dans le jeu et m’envoya tous les lecteurs qui lui rendaient visite.  Je pris donc rapidement une bonne avance sur Thériault.

Mais le vieux lion avait plus d’un tour dans son sac à malices.  Aussi adopta-t-il une stratégie qui a bien failli lui donner la victoire.  Assis derrière sa table, Thériault autographiait sans que personne ne le lui demande l’un de ses livres.  Puis il levait la tête et interpellait ainsi quelqu’une des bonnes dames qui défilaient devant lui : « Henriette ! Mais passe pas tout droit! Viens voir ton vieux chum, voyons! » La bonne dame s’approchait, Thériault lui rappelait de prétendus souvenirs communs et, quand son interlocutrice protestait qu’il y avait erreur sur la personne, le sacripant rétorquait : « J’aurais pourtant juré qu’on s’était déjà vus quelque part.  Mais ça me fait quand même bien plaisir de vous offrir mon livre autographié! » Il le mettait dans la main de la bonne dame qui, gênée de lui déplaire, se sentait obligée de passer à la caisse!

Il y aurait plein d’autres choses à raconter sur la petite histoire carnavalesque des Salons du livre tels que je les ai vécus depuis trente ans.  Mais malgré que le monde ait bien changé, y compris dans notre façon d’aborder le livre à l’occasion de ces grandes manifestations dites culturelles, quelque chose n’a absolument pas bougé depuis 1968 : s’ils sont un peu moins outrecuidants et condescendants qu’autrefois, les Français contrôlent toujours 80% du marché québécois du livre.  Ce qui explique peut-être pourquoi notre édition nationale, même dans les grands Salons du livre, est toujours considérée comme complémentaire de la seule vraie, la française.  Tout le reste n’est fondamentalement qu’anecdote et littérature, comme mon texte. " 

mardi 15 janvier 2013

Les écrivains qui…..n’ont pas encore écrit.




"Il y a toutes sortes d’écrivains, mais il y en a surtout deux catégories : ceux qu’on publie et ceux dont on refuse les manuscrits. [….]

Les écrivains refusés sont de tout poil.  Il y a d’abord ceux qui…n’ont pas encore écrit ! C’est presque toujours un étudiant.  Ses premiers contacts avec l’éditeur, il les établit parfois d’une bien drôle de façon : il demande un rendez-vous, et l’ayant obtenu, il dira à l’éditeur :

« Moi je suis pauvre, voyez-vous, et je n’ai pas de papier pour écrire.  Est-ce que vous m’en passeriez ? »

Un autre assurera l’éditeur qu’il travaille à un chef-d’œuvre mais que, pour bien travailler, il lui faut de l’argent.  Il exigera donc une avance qu’il considérera comme une « hypothèque sur mon talent ».  D’autres encore sont plus subtils : ils disent avoir écrit un manuscrit, mais comme ils n’ont pas de dactylographe, ils demandent de l’argent pour….une secrétaire qui fera le travail à leur place.  L’un a même offert de payer de l’intérêt sur la somme que l’éditeur lui avancerait!"

VLB : Les mots des autres, la passion d'éditer

mercredi 2 janvier 2013

je ne sais pas

je ne sais pas ce que Putin fait là ou encore ce que tous ces acteurs font là mais ces derniers applaudissent et font une ovation debout à la fin.  C'est la faute à JP qui m'a collé ça.